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— SERIES —

Dead is beautiful

¬ 21 scènes de crimes en Technicolor

110 x 36 cm | 1998 > 2002
Imprimé à 5 ex. sur Diasec Ultra Glossy

La vérité aujourd’hui est un leurre. Tout le monde le sait. La médiatisation à outrance a transformé notre vision du réel en une grande imposture, nous prenant en otages complaisants. Lucas Racasse n’y va pas par quatre chemins. Il digère notre époque sans concession et la traduit dans ce qu’elle a de plus reconnaissable: sa fictivité. Et l’anecdote de devenir religion. Sa vision acérée à l’épaule et sa main lacérée en écharpe, Lucas Racasse ne laisse aucune valeur morale encombrer sa ligne de mire. 
Il prône volontairement le faux pour nous faire comprendre sa réalité. Une relation amour-haine avec la violence omniprésente, faite de frustrations induites, d’enquêtes non-abouties, de paranoïa contrôlée par une esthétique de l’horreur. Un monde où paradoxalement la couleur domine, déjouant les codes habituels du genre, maquillant les crimes en prostituées de banlieues. Du noir sous ecstasy, visualisé au kaléidoscope, du fait divers porté au niveau de l’art en papier glacé. Faite de mini-scripts pour séries B, de relations déshumanisées jusqu’à la mutilation, la trame des médias, utilisée en pinceau technicolor, aplatit l’espace-temps en une scène banalisée, où l’exception confirme l’absence de règle. La gestuelle du meurtre érigée en symbole du pouvoir, dénuée de mobile, falsifiée jusque dans le traitement, nous laisse seuls face à la fenêtre. Comme s’il était grand temps de changer les tentures. Et si le travail de Lucas Racasse, qu’on pourrait qualifier de techno-réalisme, s’inscrit sans difficulté dans l’actualité de l’art contemporain, tendance digitale, ses sujets tirent leur substance des tabous qui ont secoué toute l’histoire de l’art: la lutte du bien et du mal, du sexe et de la mort. extrait du catalogue de l'exposition 'Dead is Beautiful' | Phil van Duynen | 2001

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INTRODUCTION 'Les séries & portraits' | XAVIER LÖWENTHAL | Auteur & éditeur (La 5e Couche) | 2021 — Les séries et les portraits de Lucas Racasse participent d’une esthétique baroque qu’on pourrait dire ‘d’auto-tamponneuse’ (‘d’auto-scotère’, aurait-il dit lui-même, dans son enfance brabançonne), avec les chairs et les muscles marbrés de Rank Xérox, le héros culte de Liberatore, et, simultanément, les calmes chiaroscuri des tableaux de Hopper. Ses filmstills à la Cindy Sherman, de films qui n’existent pas toujours, présentent des scènes sordides de faits divers violents, toujours nimbés d’une lumière boréale, comme une annonciation de Fra Angelico. Guy Peellaert fut son maître, sa fée, la marraine qui se pencha sur son berceau. Peellaert, qui n’avait besoin que d’une image pour dire les 129.600 que compte un film. Cela en fait des noms, en à peine quelques lignes. C’est que l’imaginaire de Racasse est plein de références : c’est un homme cultivé. Racasse a beaucoup travaillé pour l’art vivant (une soirée endiablée, c’est de l’art vivant). Ce qui est vivant meurt (sauf l’instant, qui est parfois éternel). Ce travail-là précède l’événement, l’annonce, l’accompagne parfois. L’événement passe. Il produit ces instants éternels et disparaît. Il en survient un autre et ça recommence. C’est un rythme saccadé, frénétique aussi. Il faut aller vite, rendre les choses à temps. C’est un sprint en équipe. La ligne franchie, Racasse, loin de toute urgence extérieure, mû par sa seule urgence intérieure, retrouve la solitude du coureur de fond. Car il court encore, il ne peut pas s’arrêter, il est comme la révolution qui est comme une bicyclette qui, pour ne pas tomber, va. Il se plonge alors avec délectation dans l’ouvrage obstiné de l’artisan, jusqu’à ce qu’un nouvel événement l’en arrache. C’est ainsi qu’il trompe la page blanche : en menant, parallèlement à son travail d’artiste de l’événement, plusieurs séries, de front, qui, elles, ne s’achèvent jamais. Des affiches de films qui n’existent pas, des dioramas de champs de bataille (Waterloo ! Waterloo !) évoquant l’actualité politique et les ‘grands hommes’ qui la font, à coup d’élections et de guerres, sous le regard cauteleux de Walter Bull, son Belzébuth, des chicons, des frites, des atomiums (atomia?), saint roi Baudouin et sa vierge Fabiola, la vérité de la chair putrescible dans les représentations cliché de l’amour kitsch, des travailleuses du sexe comme des portraits de reines... Et ne soyez pas surpris de ne pas reconnaître tous les portraits d’icônes à la Warholl de Racasse : à ses yeux, tous ses amis sont des pop-stars. extrait du livre 'Every day is Picture Day' | 2020
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